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La crèche de Noël dans la commune

Début décembre, les Français prennent plaisir à installer un sapin de Noël, des guirlandes et, bien souvent, une crèche de Noël. Le maire peut-il en faire autant ? Si dans certaines localités comme la Provence, la région des santons, la crèche fait partie des coutumes locales, elle a aussi fait l’objet de contentieux dans d’autres car sa portée religieuse dérange. Certaines mairies ont une crèche dans leur hall, d’autres n’y ont pas le droit. Comment s’y retrouver ?

La crèche de Noël

La crèche de Noël en équilibre sur une ligne de crête

Aujourd’hui, les Tribunaux administratifs (TA) et les Cours d’appel administratives (CAA), compétentes pour gérer ce genre de litige, se fondent sur deux décisions du Conseil d’Etat datant du 9 novembre 2016 : la Décision Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne, n° 395122 et la Décision Fédération de la libre pensée de Vendée, n° 395223. Par ces deux décisions, la Haute juridiction administrative s’applique à démontrer comment il faut apprécier la légalité de l’installation d’une crèche par la personne publique. Et en l’espèce par une collectivité locale.

Que retenir de ces deux décisions ? Toute d’abord, il faut savoir que la régularité de l’installation d’une crèche se situe sur la ligne de crête entre deux principes :

  • D’une part, le principe de la liberté de conscience et de la liberté de culte. Celle-ci est garantie par la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
  • D’autre part, le principe de laïcité, et de neutralité du service public et de ses agents. Texte inscrit au premier article de la Constitution.


Ces deux principes conjugués appellent donc à la prudence. Toutefois, le juge reconnaît que la crèche appartient aux décorations de fêtes de fin d’année. Confer la décision du Conseil d’État suivante :

« Une crèche de Noël est une représentation susceptible de revêtir une pluralité de significations. Il s’agit en effet d’une scène qui fait partie de l’iconographie chrétienne et qui, par là, présente un caractère religieux. Mais il s’agit aussi d’un élément faisant partie des décorations et illustrations qui accompagnent traditionnellement, sans signification religieuse particulière, les fêtes de fin d’année » (décision n°395122).

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Les critères pour évaluer la légalité d’une crèche de Noël

Même si votre crèche de Noël ne semble pas atteindre le principe de neutralité et fait partie intégrante des décorations hivernales de votre mairie, vous ne serez pas à l’abri d’une mobilisation à son encontre.

Pour trancher face à cette mobilisation, le juge évalue le contexte de l’installation d’une crèche dans votre mairie. Celle-ci doit être dépourvue de tout élément ressemblant à du prosélytisme. La crèche doit exclusivement présenter un caractère culturel, artistique ou festif. Cela peut paraître étrange puisqu’elle met en scène la naissance du Christ dans une mangeoire. Mais conservez à l’esprit que, légalement, la crèche ne doit en aucun cas exprimer la reconnaissance d’un culte ou marquer une préférence religieuse.

Ensuite, le juge va apprécier les conditions de l’installation. Pour ce critère, il analyse les dates d’installation et de désinstallation de la crèche. Celles-ci ne doivent pas entrer en concordance avec un calendrier religieux.

Autre critère : l’existence ou l’absence d’usages locaux. On se demande si la mairie a déjà pour habitude d’installer une crèche en fin d’année dans ses locaux ou sur son domaine public. Par exemple, la CAA de Nantes a validé en 2017 la présence d’une crèche de la nativité installée chaque année depuis 20 ans dans l’hôtel du département de la Vendée. En revanche, la même année, le TA de Lyon interdit au Président de la Région d’installer une crèche au sein de l’hôtel de Région car aucune crèche n’avait été installée auparavant dans ces locaux.

Enfin, on peut analyser la pertinence du lieu de l’installation. En effet, le juge n’apprécie pas de la même manière une crèche située au sein d’un établissement public que celle installée à l’extérieur.

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Les décisions des Tribunaux et des Cours d’Appel font preuve à la fois d’une grande sévérité mais aussi d’une certaine forme de contradiction quant à la validation ou l’invalidation de l’installation de crèche. Si vous tenez à installer une crèche dans votre mairie, voilà ce que nous pourrions vous conseiller :

  • Dans une logique de laïcité du service public, il est préférable d’installer une crèche à l’extérieur de l’Hôtel de Ville. L’idéal pouvant être dans le cadre du marché de Noël.
  • Éviter au maximum les références religieuses. Certaines mairies retirent la figure de Jésus et de sa mère.
  • De la même manière, mieux vaut ne pas installer une crèche le premier dimanche de l’Avent ni la retirer le 2 février. Ces dates sont en effet celles que prévoit la tradition chrétienne.
  • De plus, il est nécessaire d’inscrire cette démarche dans le temps long et au mieux de l’inscrire dans une habitude préexistante quand c’est le cas.
  • Globalement, n’en faites pas un acte militant. Que la présence de la crèche soit le plus normale possible. Rares sont les cas où son installation posera problème.


Dans ce sens, revenons sur l’exemple de 2017 de la CAA de Nantes qui s’est ainsi prononcée sur une “crèche ouvert[e] à tous les publics et accueillant, notamment, les manifestations et célébrations laïques liées à la fête de Noël […] résulte d’un usage culturel local et d’une tradition festive, n’est pas contraire aux exigences attachées au principe de neutralité des personnes publiques”.

Pour conclure, l’installation d’une crèche dans une mairie peut devenir un sujet éminemment politique et juridictionnel. Il faut donc bien faire les choses et respecter les principes imposés par la Constitution et la jurisprudence.