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Condamnation du maire de Sète: la responsabilité pénale des élus

Le 30 avril 2025, la Cour de cassation a définitivement reconnu François Commeinhes, maire de Sète et président de l’agglomération Sète Agglopôle Méditerranée, coupable d’un délit de détournement de fonds publics. Cette décision, marquant l’épilogue judiciaire d’un contentieux initié en 2020, rappelle les exigences juridiques pesant sur les ordonnateurs publics, fussent-ils élus. Elle entérine une condamnation à un an d’emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d’amende, et, surtout, une inéligibilité de cinq ans. Si la peine complémentaire d’interdiction d’exercer les fonctions de maire et de président d’agglomération a été annulée pour erreur de droit, elle ne remet nullement en cause le prononcé de l’inéligibilité, qui emporte à elle seule une conséquence politique immédiate. L’intéressé a donc présenté sa démission au préfet, mettant fin à un mandat entamé en 2001.

Responsabilité pénale des élus: condamnation du maire de Sète

Une infraction financière au cœur du contentieux

L’affaire trouve son origine dans un rapport de la chambre régionale des comptes, publié en 2020. Ce document mettait en lumière des versements de rémunérations complémentaires, d’un montant cumulé avoisinant 99 000 euros, effectués entre 2016 et 2019 au profit de Patrick Millet. Ce dernier était alors directeur général des services de la commune et de l’agglomération. Ces compléments, mensuellement fixés entre 2 000 et 3 000 euros, n’étaient pas prévus par les textes réglementaires applicables. Le parquet de Montpellier avait alors estimé que ces avantages constituaient un détournement manifeste de fonds publics. Dès lors, cette faute engageait la responsabilité pénale de l’ordonnateur.

En première instance, le tribunal correctionnel avait néanmoins prononcé la relaxe de François Commeinhes et de Patrick Millet. La juridiction avait retenu l’absence d’intention frauduleuse. Elle laissait ainsi place à un doute raisonnable sur la conscience qu’avait le maire des conséquences juridiques de sa signature. Cependant ce raisonnement, fondé sur la difficulté pratique pour un maire de contrôler l’intégralité des pièces soumises à son visa, n’a pas été partagé par la cour d’appel. Cette dernière a, sur appel du ministère public, infirmé le jugement.

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L’inéligibilité confirmée, l’interdiction d’exercice écartée : un point de droit important

La cour d’appel de Montpellier, dans son arrêt du 9 octobre 2023, avait prononcé une double peine complémentaire. D’une part, le maire de Sète était frappé d’inéligibilité pour une durée de cinq ans, prévue par l’article 131-26 du Code pénal. D’autre part, la cour avait ordonné l’interdiction d’exercer les fonctions de maire et de président de communauté d’agglomération, en application de l’article 131-27 du même code. C’est cette seconde disposition que la Cour de cassation a censurée.

En effet, les magistrats de la chambre criminelle ont rappelé un principe fondamental. L’interdiction d’exercer une fonction publique, telle que visée par les peines complémentaires prévues au Code pénal, ne peut s’appliquer aux mandats électifs. Ceux-ci ne constituent pas une activité professionnelle ou sociale au sens des textes. Dès lors, la peine d’interdiction d’exercer les fonctions de maire et de président d’agglomération était illégale. La Cour a donc cassé l’arrêt d’appel sur ce seul point, par voie de retranchement. Elle maintient toutefois la culpabilité et l’ensemble des autres peines, notamment l’inéligibilité, qui produit les mêmes effets pratiques.

Cette décision illustre l’importance du respect des distinctions juridiques entre les fonctions électives et les fonctions administratives. Elle montre également que l’inéligibilité reste l’instrument principal de mise à l’écart d’un élu condamné. Et ce, indépendamment des autres peines accessoires que l’on pourrait être tenté de prononcer.

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Une jurisprudence qui rappelle la responsabilité pénale des élus et la rigueur exigée

En confirmant la responsabilité pénale d’un maire pour la validation de rémunérations irrégulières, la Cour de cassation rappelle d’abord que les élus locaux sont pleinement comptables de leurs actes. Ils sont en effet les ordonnateurs de la dépense publique. Même lorsque les faits sont commis par un agent de direction, la signature de l’exécutif engage sa responsabilité. En particulier lorsque les montants en cause sont significatifs et les anomalies structurelles.

En outre, cette décision appelle à une vigilance accrue dans les pratiques de gestion. Elle concerne notamment le contrôle des actes signés par le maire ou le président d’intercommunalité. Dans les communes, les élus doivent s’entourer d’un contrôle juridique rigoureux, doublé d’une traçabilité formelle des validations. Cette précaution leur évite de se retrouver personnellement engagés pour des choix dont ils n’auraient été que les avaliseurs apparents.

La condamnation de François Commeinhes constitue également un signal clair pour les candidats aux élections municipales à venir. L’exercice du pouvoir local suppose une maîtrise minimale des responsabilités juridiques associées aux fonctions de maire ou d’adjoint dans une commune. La confusion fréquente entre la délégation politique et la confiance administrative trouve ici une limite manifeste. Enfin, cette affaire démontre que les procédures de contrôle, depuis les chambres régionales des comptes jusqu’aux juridictions pénales, forment un continuum cohérent de vigilance républicaine sur la gestion des collectivités territoriales.