À l’automne 2024, le sujet de l’artificialisation des sols est revenu sur le devant de l’actualité politique en France. Les sénateurs ont publié le 9 octobre dernier un rapport sur la loi ZAN (zéro artificialisation nette) dénonçant les insuffisances de l’État dans l’application de la loi et les contraintes imposées aux collectivités locales. Dès lors, le Sénat prépare un texte législatif sur le sujet. Qu’en est-il pour les communes aujourd’hui ? Quelles exigences pèsent sur elles et pourquoi est-ce si urgent de limiter l’artificialisation des sols ?
La lutte contre l'artificialisation des sols : un enjeu majeur dans les territoires
L’artificialisation des sols se définit comme la transformation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers en surfaces artificielles (bâtiments, routes, parkings, etc.). Chaque année, entre 20 et 30.000 hectares de ces espaces sont consommés. Cela équivaut à 3,7 terrains de football par heure d’après le Ministère de l’écologie. Ce phénomène a plusieurs conséquences pour les territoires. Sur un plan écologique d’abord, l’artificialisation entraîne de toute évidence un déclin de la biodiversité. Elle aggrave les risques d’inondation car l’imperméabilisation des sols empêche l’infiltration de l’eau. De plus, l’artificialisation réduit le stockage du carbone dans le sol qui régule normalement le réchauffement climatique en ville.
Par ailleurs, l’artificialisation des sols peut présenter des conséquences socio-économiques. La première est l’augmentation des coûts pour les collectivités. En effet, l’étalement urbain nécessite la création et l’entretien d’infrastructures supplémentaires. En outre, on constate en théorie un allongement des temps de déplacement des ménages. La dépendance à la voiture s’accroît et les trajets domicile-travail sont plus longs. Par conséquent, ceci entraîne une hausse des dépenses des ménages, en sachant que les habitations dispersées sont souvent moins efficaces énergétiquement.
Les communes sont donc au cœur de cette problématique. En tant que gestionnaires de l’aménagement du territoire, elles élaborent leur plan local d’urbanisme (PLU) qui détermine l’utilisation des sols. Elles doivent donc concilier développement économique, besoins en logements et préservation des espaces naturels et agricoles. La lutte contre l’artificialisation des sols implique une planification urbaine réfléchie. Elle doit favoriser la densification des zones déjà urbanisées et la réhabilitation des friches, tout en préservant les espaces non encore artificialisés.
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Le Zéro Artificialisation Nette (ZAN), un objectif ambitieux pour les communes
La loi « Climat et Résilience » de 2021, donne des objectifs ambitieux pour la lutte contre l’artificialisation des sols. Elle vise à réduire de moitié le rythme d’artificialisation des sols d’ici 2031, puis d’atteindre le « zéro artificialisation nette » (ZAN) à l’horizon 2050.
Pour y parvenir, la loi impose aux communes et intercommunalités une révision de leurs documents d’urbanisme pour inclure des dispositions limitant l’étalement urbain et préservant les espaces naturels et agricoles. De plus, les communes doivent privilégier la réhabilitation de friches, la densification et la rénovation urbaine plutôt que l’extension sur des zones naturelles ou agricoles. Enfin, les mairies sont tenues de mesurer et de rapporter régulièrement les données de leur consommation d’espaces, afin de vérifier le respect des objectifs fixés. Le portail national de l’artificialisation recense ces données et fournit des outils aux élus sur ce sujet.
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La loi du 20 juillet 2023 : des mesures d’accompagnement au ZAN
Face à la rigidité de la loi de 2021, celle du 20 juillet 2023 vise à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux. Elle met en place une enveloppe minimale d’artificialisation. Chaque commune ayant fait preuve d’un effort en matière de lutte contre l’artificialisation bénéficie d’une enveloppe d’un hectare d’artificialisation pour la première période décennale (2021-2031). La loi prévoit également des outils juridiques spécifiques :
- L’élargissement du droit de préemption urbain. La préemption est un droit pour une mairie d’acquérir en priorité un bien immobilier mis en vente, afin de réaliser un projet d’intérêt général. Ici, un projet de renaturation, de rénovation urbaine ou de réhabilitation de friches, pour éviter l’artificialisation des sols.
- Un nouveau sursis à statuer. On dit que le maire “sursoit à statuer” lorsqu’il suspend l’examen d’une demande d’urbanisme en attendant qu’une condition externe soit réalisée. Par exemple, en attendant que le PLU soit révisé en faveur d’une artificialisation plus sobre des sols.
- L’ajustement pour les communes littorales soumises à l’érosion côtière et à la perte de foncier. Cette mesure vise à prendre en compte leurs difficultés dans le PLU.
Les maires ne peuvent donc plus faire construire ou autoriser la construction de logements, commerces ou sites industriels n’importe où sur le territoire de leur commune car la loi protège désormais les espaces naturels, agricoles et forestiers. Comme tout problème de nature écologique, la réalité d’un phénomène naturel critique, la bétonisation, se heurte à la réalité économique et sociale des communes, le besoin de se développer.