Face à l’urgence climatique et à l’impact alarmant de la pollution sur la santé publique, les Zones à Faibles Émissions (ZFE) s’imposent dans le quotidien des villes en France. Depuis leur adoption par la loi LOM de 2019, elles se déploient dans les zones urbaines les plus touchées, comme Paris ou Lyon. Et depuis quelque temps, dans une trentaine d’agglomérations, imposant des restrictions drastiques à la circulation des véhicules polluants. Les ZFE provoquent aujourd’hui la réaction des usagers et des élus locaux. Pris entre les impératifs écologiques et les réalités socio-économiques de leurs territoires, les maires des communes situées dans le périmètre de telles zones sont en première ligne. Le 28 mai 2025, l’Assemblée Nationale les a finalement supprimées.

Définition et enjeux actuels des ZFE
Une Zone à Faibles Émissions (ZFE) ou Zone à Circulation Restreinte (ZCR) est un espace urbain délimité dans lequel la circulation de certains véhicules est interdite. La loi d’organisation des mobilités, dite “LOM” de 2019, renforcée par la loi “Climat et résilience” de 2021, a créé ces zones. Elles visent à préserver la qualité de l’air en réduisant l’émission de particules fines, néfastes pour la santé. Par conséquent, elles concernent les villes où la circulation automobile est la plus importante.
Les ZFE s’appliquent notamment à Paris depuis quelques années. Elles apparaissent de plus en plus sévères. Toutefois, elles reviennent ces jours-ci au devant de l’actualité. Elles suscitent le mécontentement des particuliers et des responsables locaux. De fait, depuis le 1er janvier 2025, de nouvelles restrictions s’imposent. En effet, les véhicules ayant une vignette Crit’Air 5, 4 et 3 ne peuvent plus circuler à Paris et à Lyon. En outre, les véhicules “non-classés” ne pourront plus circuler dans les territoires qui dépassent régulièrement les seuils de pollution atmosphérique. Ni dans les agglomérations de plus de 150.000 habitants. Cette restriction concerne une trentaine d’agglomérations telles qu’Avignon, Metz, Brest ou encore Bayonne. Il s’agit ici de véhicules immatriculés avant 1997 pour les voitures et avant 2000 pour les motocycles, dit “non-classés” dans l’échelle des Crit’Air.
Découvrez nos formations en ligne gratuites 🚀
L’équipe Politicae vous propose des formations en ligne gratuites pour vous aider à préparer votre campagne électorale.
Les responsables locaux en première ligne
Cette problématique résonne aujourd’hui à l’échelle nationale. Pourtant, elle concerne surtout les maires et leurs conseillers. En effet, “L’État assure, avec le concours des collectivités territoriales (…) la surveillance de la qualité de l’air et de ses effets sur la santé et sur l’environnement.” (art. L221-1 Code de l’environnement). De plus, le CGCT codifie les dispositions légales et réglementaires concernant les ZFE, notamment aux articles R2213-1-0-1 et suivants. Ce n’est donc pas le préfet qui régule la circulation de certains véhicules dans les villes, mais bien les collectivités territoriales. Celles-ci sont responsables à la fois de la qualité de l’air et des mobilités.
La loi impose ainsi à certaines collectivités de mettre en place une ZFE. Mais le maire ou le président de l’EPCI peut en prendre l’initiative. C’est ce qu’ont fait les maires de Grenoble et Montpellier. Pour ce faire, une étude règlementaire est préalablement réalisée. Le projet est ensuite soumis à la consultation du public et entre autres à l’avis des conseils municipaux de l’EPCI et des communes limitrophes. Le projet doit comporter la liste des véhicules concernés, les motifs de la restriction et son périmètre, les bénéfices attendus ainsi que les impacts socio-économiques. Les textes prévoient aussi la possibilité de dérogations individuelles. Le maire ou le président de l’EPCI peut les accorder, en réponse à une demande motivée. Enfin, un arrêté instaure le périmètre de la ZFE et les règles applicables. Toute infraction donne lieu à des contraventions de droit commun, conformément au Code de la route.
Téléchargez nos livres blancs
L’équipe Politicae vous propose des livres blancs à télécharger gratuitement sur notre site internet. Télécharger le vôtre dès maintenant !
L’appropriation de la politique de la ZFE par les élus locaux
Premièrement, notons qu’en vertu du transfert de la compétence de l’organisation des mobilités à l’EPCI, les textes transfèrent les pouvoirs de police du maire en matière de circulation au président d’intercommunalité. Ce dernier assure donc le contrôle et l’application de la ZFE dans les communes membres.
Deuxièmement, les élus locaux peuvent proposer des aides ou des solutions de remplacement aux habitants les plus touchés par les ZFE au quotidien. La métropole de Montpellier prévoit par exemple des itinéraires desservant des parkings-relais et des zones d’activités économiques. Une dérogation spéciale « petit rouleur » est également envisagée pour les véhicules parcourant moins de 8000 km chaque année. Par ailleurs, au vu de la suppression des aides étatiques, plusieurs communes concernées par une ZFE proposent une aide financière. À Rouen, tout habitant souhaitant investir dans un véhicule propre peut percevoir une aide de 4000€ de la part de la ville. Autre exemple, la métropole de Grenoble prévoit une application progressive des verbalisations. Par une communication renforcée, elle propose des solutions alternatives. Par exemple, un abonnement vélo offert, des tarifs préférentiels pour les transports en commun.
Enfin, la mise en place d’une ZFE nécessite une fine pédagogie à l’égard des administrés. Des plans de communication permettent d’anticiper les contraintes et de les rendre plus acceptables par les usagers. Pour cela, l’État propose des kits numériques de sensibilisation et d’information à destination des usagers et des acteurs publics. Il va de soi que les collectivités doivent aussi installer de nouveaux panneaux de signalisation indiquant le périmètre de la ZFE. Pour accompagner les collectivités dans l’élaboration de ce dispositif étatique, il existe un vade mecum sur la mise en place des ZFE par les collectivités.
La suppression des ZFE: ce qui change pour les automobilistes
Le 28 mai dernier, l’Assemblée Nationale a finalement supprimé les ZFE. Désormais, la suppression des vignettes Crit’Air permet aux propriétaires de véhicules considérés comme polluants d’entrer dans le périmètre des anciennes zones. Ainsi, les 25 métropoles et agglomérations (Paris, Grenoble, Lyon, Montpellier, Nantes, Rouen, Bordeaux…) sont de nouveau ouvertes à tous. En revanche, cette décision risque de faire perdre à la France des subventions de l’Union Européenne.
Le motif principal de ce retour en arrière est que les ZFE renforçaient les inégalités sociales, rendant les métropoles inaccessibles aux personnes n’ayant pas les moyens d’acheter une voiture récente et moins polluante. Des milliers d’automobilistes n’auront donc plus à contourner ces zones d’où ils étaient auparavant proscrits. Les ZFE apparaissaient également comme une mesure d’écologie “punitive” et contraignante pour les usagers. Cette suppression des ZFE n’est pourtant pas encore complètement acté, puisque le gouvernement peut demander un deuxième vote, ou saisir le Conseil Constitutionnel. Une commission mixte paritaire peut également annuler cette suppression. Par ailleurs, certains maires écologistes, comme celui de Bordeaux, prévoient de remplacer la ZFE par d’autres mesures contraignantes.
Enfin, ce vote intervient dans le cadre plus large d’un projet de loi de simplification de la vie économique. Il faut donc attendre que cette loi soit adoptée pour acter définitivement la disparition des ZFE.