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Réforme du scrutin des municipales

Le 7 avril 2025, l’Assemblée nationale a adopté un texte qui bouscule la préparation des élections municipales dans les communes de moins de 1.000 habitants. Jusqu’à présent, ces communes bénéficiaient d’un système souple, marqué notamment par le panachage et l’absence de listes paritaires obligatoires. Cependant, les réformes engagées pour le prochain renouvellement général des conseils municipaux annoncent des bouleversements profonds. Examinons les contours du système actuel pour analyser les transformations induites par la réforme du scrutin, en mesurer les difficultés pratiques et les conséquences sur le tissu communal.

Le système électoral actuel des communes de moins de 1.000 habitants

Jusqu’à l’entrée en vigueur de la réforme votée ce lundi 7 avril, les communes de moins de 1.000 habitants appliquent un mode de scrutin dit plurinominal majoritaire à deux tours. Ce scrutin permet aux candidats de se présenter personnellement, sans contrainte de liste. Il autorise les électeurs à panacher librement les candidatures. Concrètement, les électeurs pouvaient rayer des noms sur les listes proposées, en ajouter d’autres, voire panacher des candidats de différentes sensibilités locales. Cette liberté favorise l’expression des dynamiques de proximité, sans contrainte partisane ou de liste figée.

En outre, l’obligation de parité ne s’imposait pas à ces petites communes, laissant aux candidats la faculté de composer des groupes non équilibrés entre hommes et femmes. Si ce système offrait une grande souplesse, il n’était pas exempt de critiques. En effet, les pratiques de panachage rendaient plus complexe le dépouillement et allongeaient les délais de proclamation des résultats. Par ailleurs, l’absence d’encadrement strict laissait parfois émerger des équilibres fragiles au sein des conseils municipaux. C’était notamment le cas lors d’élections partielles ou de démissions en cours de mandat.

Ce cadre électoral traditionnel, enraciné dans la vie locale, répondait aux spécificités du monde rural. Toutefois, le législateur, soucieux de renforcer la lisibilité démocratique et la parité, a choisi de le réformer en profondeur.

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Les grandes lignes de la réforme du scrutin

La réforme du scrutin municipal dans les communes de moins de 1.000 habitants repose sur une volonté d’harmonisation des scrutins. Désormais, ces communes seront soumises au scrutin de liste, avec représentation proportionnelle assortie d’une prime majoritaire pour la liste arrivée en tête. Ce système, déjà en vigueur dans les communes de plus de 1.000 habitants, est censé garantir une meilleure stabilité des majorités municipales et clarifie les rapports de force politiques.

La suppression du panachage constitue un tournant décisif. Les électeurs devront désormais voter pour des listes figées, sans possibilité d’ajouter ou de retirer des noms. Cette modification vise à simplifier le dépouillement et à renforcer la cohérence des équipes municipales. Toutefois, elle bouleverse les habitudes démocratiques des électeurs ruraux, attachés à la personnalisation du vote.

Autre changement notable, la parité devient obligatoire dans la composition des listes. Les candidats devront respecter une stricte alternance entre hommes et femmes. Un tel principe a pour objectif affiché d’améliorer la représentation féminine au sein des conseils municipaux.

Par ailleurs, la nouvelle loi tolère que les listes de candidats soient incomplètes. Normalement, elles doivent compter autant de noms que de sièges à pourvoir, plus deux au maximum. Avec cette réforme, les candidats pourront déposer des listes comptant au minimum deux noms de moins que le nombre de sièges à pourvoir. Cette tolérance concerne également les conseils municipaux des communes de moins de 1.000 habitants. Ceux-ci seront réputés complets même s’il leur manque 2 élus au plus. 

Enfin, si la réforme maintient le mécanisme de renouvellement partiel en cas d’élections complémentaires, celui-ci devra s’effectuer par un scrutin de liste. Ladite liste devra comporter un nombre de candidats correspondant au minimum au nombre de conseillers manquants moins deux.

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Les défis et risques posés par la réforme dans les petites communes

Si la réforme du scrutin poursuit des objectifs clairs de simplification et de modernisation, elle soulève néanmoins plusieurs difficultés majeures, surtout dans les territoires ruraux. L’obligation de constituer des listes complètes, paritaires et figées complique considérablement le recrutement de candidats. Déjà, dans les communes de plus de 1.000 habitants, cette exigence se heurte à une faible mobilisation, en particulier chez les femmes en milieu rural. Dans les communes plus petites encore, cette contrainte pourrait devenir insurmontable.

Ce phénomène risque d’entraîner une augmentation significative du nombre de communes sans conseil municipal élu. Ces collectivités basculeraient alors sous administration préfectorale provisoire, une situation préoccupante pour la vitalité de la démocratie locale.

Par ailleurs, la réforme pourrait accélérer les mouvements de fusions communales. Des villages jusque-là autonomes pourraient se voir contraints de rejoindre des intercommunalités plus larges. Ou alors, elles seraient obligées de fusionner avec des communes voisines pour assurer la continuité de leur gouvernance locale. Ce processus, s’il répond à des impératifs de rationalisation administrative, risque néanmoins d’éroder le lien direct entre les élus et les administrés, pilier fondamental de la démocratie de proximité.

Enfin, la disparition du panachage supprime une modalité d’expression individualisée du suffrage, chère aux électeurs des petites communes. Cette évolution pourrait accentuer le sentiment de dépossession électorale chez des citoyens historiquement attachés à cette liberté de choix. En voulant rationaliser le fonctionnement démocratique local, la réforme électorale risque paradoxalement de fragiliser le tissu social des petites communes, en éloignant encore davantage les électeurs de leurs institutions locales.